Catel Muller: «Plus tard, je voulais faire Bretécher»
Catel Muller s’est lancé dans la bande dessinée en suivant l’exemple de Claire Bretécher. Elle évoque son modèle disparu, et leur belle amitié.
L’émotion est grande, évidemment, après l’annonce de la disparition de Claire Bretécher,
à l’âge de 79 ans.
A fortiori du côté des nombreuses autrices de bande dessinée à qui elle avait ouvert la voie à une époque où le dessin était un art réservé à ces messieurs. Parmi ses successeures, Florence Cestac et Catel Muller sont celles qui ont sans doute le mieux pris la suite.
A fortiori du côté des nombreuses autrices de bande dessinée à qui elle avait ouvert la voie à une époque où le dessin était un art réservé à ces messieurs. Parmi ses successeures, Florence Cestac et Catel Muller sont celles qui ont sans doute le mieux pris la suite.
Cette dernière, 55 ans, avait même, un temps, envisagé de dessiner une biographie de celle qui était peu à peu devenue une amie (et qui l’avait même croquée, voir dessins joints à cet article). Peu avant de débuter une longue tournée médiatique radio et télé, elle a accepté de nous parler de leur relation et de la place, majeure, qu’occupera à jamais son aînée dans l’histoire du neuvième art.
Catel, Claire Bretécher, c’était quoi, c’était qui pour vous?
Elle a toujours fait partie de ma vie. C’est avec elle que j’ai découvert la bande dessinée adulte. Il y a d’abord eu Goscinny, avec notamment Astérix, puis Bretécher, avec Agrippine. Et ça a été un choc. J’ai compris à ce moment-là, que je voulais devenir dessinatrice. Non, en fait, plus tard, je voulais faire Claire Bretécher. Elle était tellement douée, tellement belle, tellement drôle. Et puisque j’ai eu la chance de la rencontrer plusieurs fois, et de peu à peu me rapprocher d’elle, j’ai eu le bonheur de pouvoir le lui dire: c’est un regret que je n’aurai pas. J’ai même envisagé, par deux fois, de dessiner sa bio. Mais elle avait déjà tout raconté dans ses livres: qu’aurai-je pu apporter de neuf?
«Elle a inventé un style et un langage. Il y avait chez Claire une syntaxe et un argot qui n’appartenaient qu’à elle»
Plus que toute autre, elle a ouvert la voie du neuvième art aux femmes?
Il faut se souvenir de ce qu’était le monde et la bande dessinée quand elle a commencé: un monde d’hommes, il fallait pouvoir s’y imposer. En plus, elle était très jolie, ce qui veut dire qu’elle ne devait pas manquer de sollicitations. Et pourtant, elle est parvenue à tenir les rênes de son attelage. D’abord grâce à Goscinny, qui lui a donné sa chance, et peu à peu permis de développer son univers et son humour. Seule, ensuite. Elle a quand même fondé son propre journal, puis s’est lancée dans l’autoédition.
C’était un fameux caractère?
Ah ça, elle était gonflée. Culottée, même. Mais drôlement talentueuse, d’abord. Son dessin, très simple, était en fait très sophistiqué. C’était une virtuose, qui a progressé très rapidement après des débuts un peu difficiles: les décors à l’ancienne, ce n’était pas son truc. Et au final, elle a inventé un style et un langage. Il y avait chez Claire une syntaxe et un argot qui n’appartenaient qu’à elle.
«Elle parlait aux femmes, mais surtout des femmes.»
C’est pour ça qu’elle a touché un public plus large que celui de la bande dessinée? Sa notoriété a largement dépassé ce seul cadre…
Oui, sans doute en partie parce qu’elle a su intéresser des femmes qui ne lisaient absolument pas de bande dessinée. Elle est devenue un phénomène de la dérision sociale en bande dessinée. Au point qu’elle a fini par être considérée comme une sorte de sociologue. Son public a su voir au-delà du dessin: comme quelqu’un qui luttait. Contre la xénophobie, le racisme, pour le féminisme, toujours en marge mais toujours avec humour, aussi. Bien avant qu’ils ne deviennent des préoccupations partagées par tous, elle a parlé de sujets comme la contraception, la maternité, l’esclavage domestique. Elle parlait aux femmes, bien sûr, mais surtout des femmes. Et c’est ce qui leur plaisait.
(Interview : Michaël DEGRÉ, article paru le 11 février à L’avenir.net)
Une autre belle présentation:
Claire Bretécher, chroniqueuse des moeurs à la plume acérée
Claire Bretécher en 1973. |
La Biographie de CLAIRE BRETÉCHER
Claire Bretécher est une auteure de bande dessinée humoristique et illustratrice française, née le 17 avril 1940a à Nantes et morte le 10 février 20201.
Après avoir collaboré aux principaux titres de la presse jeunesse franco-belge dans les années 1960 (Record, Tintin et Spirou), Bretécher participe à l'émergence de la bande dessinée adulte francophone en rejoignant Pilote en 1969 puis en cofondant L'Écho des savanes en 1972. De 1973 à 1981, elle publie dans l'hebdomadaire d'information généraliste Le Nouvel Observateur une série de gags en une ou deux pages moquant les comportements de la gauche bourgeoise bien-pensante, Les Frustrés, première bande dessinée francophone à succès basée sur la critique sociale. Ensuite, tout en travaillant ponctuellement pour la presse, elle continue à se faire la sociologue des classes moyennes supérieures urbaines en consacrant des albums à la maternité, à la médecine, au tourisme, puis à l'adolescence avec sa deuxième œuvre phare, la série Agrippine (1988-2009).
Seule femme à avoir collaboré aux principaux périodiques franco-belges classiques, Claire Bretécher jouit d'une notoriété assez importante dès le début des années 1970, qui va s'accroissant tout au long de la décennie grâce à sa collaboration au Nouvel Observateur. Régulièrement invitée dans les médias et traduite dans de nombreuses langues, cette autrice majeure de la bande dessinée francophone a reçu plusieurs prix importants, dont en 1982 un Grand Prix d'Angoulême spécial remis par les lauréats précédents. En 2015, elle a fait l'objet d'une exposition rétrospective à la Bibliothèque publique d'information du
Centre Beaubourg, à Paris.
Parallèlement à ses bandes dessinées, Bretécher a beaucoup travaillé pour la publicité et a réalisé un œuvre peint qui a fait l'objet de plusieurs recueils. C'est par ailleurs une pionnière de l'auto-édition d'albums de bande dessinée, qu'elle pratique de 1975 au milieu des années 2000. Les Frustrés (en 1975) et Agrippine (en 2001) ont été adaptés en dessin animé.
ŒUVRES DE CLAIRE BRETÉCHER
Séries principales
Agrippine 1988 2009
Baratine et Molgaga 1977
Cellulite 1972 2010
Docteur Ventouse, Bobologue 1985 1986
Inédits (Bretécher) 2007
Moments de lassitude 1999
Mouler démouler 1996
La vie passionnée de Thérèse d'Avila 1980
Les amours ecologiques du bolot occidental 1977
Les angoisses de Cellulite 1974
Les états d'âme de Cellulite 1972
Les Frustrés 1975 1985
Les GnanGnan 1976
Les Mères 1982
Les Naufragés (Cauvin/Bretécher) 1976
Petits travers 2018
Salades de saison 1973
Tourista 1989
Au revoir Claire!
[Contribution de Philippe]
Merci beaucoup.
Publié par Monsieur Augustin
Très bel hommage ! RIP
RépondreSupprimerQue c'est triste! Nous avons perdu la grande dessinatrice de BD Bretécher,
RépondreSupprimerMerci beaucoup Philippe pour cet hommage bien mérité
Triste perte d'une grande femme et d'un grand artiste. Hommage mérité
RépondreSupprimerUn partage impressionnant qui rend justice à un grand artiste. Merci Philippe et M. Augustin
RépondreSupprimerMerci infiniment.
RépondreSupprimerTriste nouvelle. triste disparition Comme le dit le titre de l'article: Au revoir Claire !!
RépondreSupprimerEn plus d'avoir beaucoup de talent et un style inimitable, elle était si belle....
RépondreSupprimerhttps://babelio.com/users/AVT_Claire-Bretecher_2662.jpeg
Triste nouvelle pour les frustrés qui perdent la grande dame de la BD.
RépondreSupprimerClaire Bretécher… Chaque fois que j'entends son nom, je repense à mes années lycée. J'ai eu un prof de français qui nous parlait d'Agrippine à chaque cours.
RépondreSupprimerR.I.P. Claire ! :'(