Seulement BD: Récits Historiques J2 Jeunes (1964-1966) 01

Les hebdomadaires pour la jeunesse souhaitaient avant toute chose distraire leur lectorat.

Mais le côté éducatif n’était jamais bien loin. Que celui-ci soit un alibi pour les parents ou qu’il fut délibérément réfléchi, il était bien là.

A ce titre les belles histoires de l’Oncle Paul dans Spirou furent assez rapidement adaptées à la sauce Tintin sans d’ailleurs que cette rubrique portât un nom avant de s’appeler à la fin des années 60, Histoires Vraies. A ces histoires le journal rajoutera une série intitulée Histoire du Monde qui de 1955 à 1962 distillera chaque semaine un rédactionnel agrémenté

des dessins de Fred et Liliane Funcken.

Pilote reprendra le même principe de récits complets de 2 ou 3 pages sous la forme de textes situés sous les dessins, beaucoup d’entre eux étant dessinés par Pascal, qui il faut bien l’avouer était meilleur comme illustrateur que dessinateur de BD. Le journal offrira également en pages centrales des Pilotorama, écorchés panoramiques dont l’idée avait été lancée par Eagle Outre-Manche. Louis Murtin, Henri Dimpre en seront les principaux dessinateurs jusqu'à l’arrêt de la série en 1970.

J2 Jeunes qui était né de la fusion de Cœurs Vaillants pour les garçons et Âmes Vaillantes pour les filles ne pouvait rester en dehors de cette tendance. Disons-le tout net, tous ces hebdomadaires, et partant toutes ces histoires authentiques sont dans la lignée des images d’Epinal. Se cantonneraient-elles à l’histoire de France qu’on les fustigerait de participer au « roman national » ; une chose qui est très mal vue aujourd’hui par certains historiens mais pas l’époque. En tout état de cause elles permettaient néanmoins de faire de ces petits écoliers de petits Français

avec un tronc historique et culturel commun.

Ces histoires ont donc brassé toutes les époques et à peu près tous les coins du globe, peut-être que celles publiées par J2 Jeunes étaient-elles davantage centrées sur l’Hexagone, et encore la chose peut se discuter.

J2 Jeunes était un journal catholique pourtant sur les plus de 100 histoires que vous allez lire moins d’une dizaine relèvent de la Bible ou de la foi chrétienne et encore parmi elles quelques péripéties de missionnaires dans des contrées lointaines, l’exotisme étant toujours un sujet « vendeur ».

Pour mieux relativiser les choses il y a autant d’histoires sportives que religieuses, preuve de la diversité des récits.

Néanmoins par rapport à leurs « concurrentes » de Tintin ou Spirou ces planches ne bénéficient pas de la même qualité dans la mise en couleurs et font un peu pauvrettes. Il me semble cependant qu’il était temps de redécouvrir ces pages encore inédites en albums.

Robert Rigot (1908-1998) est un nom qui est passablement oublié aujourd'hui, il fut pour-tant nomme très officiellement dessinateur principal du mouvement

Cœurs Vaillants/ Âmes Vaillantes dès 1940.

Il souffre en fait d'avoir essentiellement travaillé pour la presse catholique, chez Fleurus,

même si on le retrouve chez le Journal de Mickey dans Zorro (974-1971)

et dans divers quotidiens dont L'Humanité.

Par ailleurs hormis les vies de saints et autres martyrs (une vingtaine de recueils sur cent

dans la Collection Belles Histoires et Belles Vies) peu d'albums de sa main furent éditées de son vivant.

Son personnage le plus connu est incontestablement Frédéric le Gardian dont davantage d'albums sont sortis depuis le décès de l'auteur que de sou vivant.

Rigot est certes un bon dessinateur, il fit en son temps l'École des Arts Appliqués,

fut affichiste de cinéma et réalisa de nombreuses publicités.

Pourtant son dessin, bien que lisible, nous parait aujourd'hui vieillot...

(Plus d'info dans l'album)

On pense parfois que les années 60 sont plus proches de nous que la Troisième République. Au niveau des mentalités c'est certainement faux. Grosso modo, avant comme

après-guerre, ou est sur le même tempo. La France est un pays majoritairement catholique et pratiquant à défaut d'être nécessairement croyant. Si les femmes ont le droit

de vote il leur faut l'autorisation de leur mari pour ouvrir un compte bancaire jusqu'en 1965, les

grandes écoles comme HEC ou Polytechnique ne sont réservées qu'aux garçons, le divorce est autorisé

mais mal vu, l'avortement non thérapeutique reste un crime, la télé française est sous le contrôle de

l'état et le ministre de l'information supervise le conducteur de chaque journal télévisé.

Quant à la sexualité c'est un sujet tabou.

Voilà évoquée à grands et gros traits l'état des esprits d'alors. Mai 68 et plus sûrement la fin des 30

Glorieuses vont sonner la fin d'une période où le chômage est inexistant, où chaque prochaine année

sera meilleure que la présente, etc...(Plus d'info dans l'album)

De Julio Ribera (1927-2018) ou connait surtout sa série au long cours avec Christian Godard,

le Vagabond des Limbes, on se souvient aussi de sa parodie de Vampirella, Dracurella,

un peu moins du Grand Scandale ou de Chroniques du Temps de la Vallée des

GChlomes. Mais sou véritable chef d'œuvre, celui qu'il réalisa seul est Montserrat.

Cette autobiographie en 3 tomes raconte son enfance miséreuse à Barcelone,

la guerre civile, la chape franquiste et enfin sou départ pour la France en 1954,

avec des débuts difficiles malgré l'ivresse de la liberté.

Les 3 albums furent repris plus tard sous le titre Mon crayon et moi mais sous

un format plus petit et en noir et blanc.

À son arrivée en France il travaille pour différentes revues, Zorro, Liselte,

Pierrot mais aussi des quotidiens, France Soir, L'Aurore, Le Parisien Libéré.

Pour Bayard, il créé la série de science-fiction, Tony Sextant.

Pour J2 Jeunes, il va livrer quelques illustrations et 20 récits complets.

Ce recueil en reprend 19, celui qui

manque est disponible dans le tome 1 de cette collection puisqu'il appartient

à la série des Grandes Heures de...

Mais il est temps de redécouvrir ce grand dessinateur

qui s'il n'était pas encore à son zénith n'en n'étai plus très loin.

Juillard on connait tous, ou on croit connaitre. Chaque album est une nouvelle merveille de beauté et de précision, Or voici qu'on découvre sa signature dans J2 Jeunes dès 1964.

Pas de doute quand on compare les deux planches (cf. infra) il y a bien

quelque chose, une pâte, un style, mème si bien sûr les dessins de droite sont nettement

plus aboutis. D'ailleurs le site BDOubliées attribue sans hésitation les récits de J2 Jeunes à

André Juillard, La précision du prénom est importante.

Pourtant en 1964, André n'a que … 16 aus. Si jeune et faire preuve déjà de tant de maitrise ?.

D'autant qu'à cette maitrise il ajoute la modestie puisque dans son

interview aux Cahiers de la Bande Dessinée (#56, février 1984), il ne mentionne

pas ces débuts aussi prometteurs.

Du coup, la bibliographie dans ce mème numéro y'en parle pas. Le Juillard de J2 Jeunes est donc un autre. Sauf que les différents sites ne signalent pas d'autres

Juillard, sauf un Claude-Heuri Juillard (915-1990).

Problème, ce Juillard là ne signe pas de son nom mais de ses seuls prénoms. Bah,

ce ce n'est pas la première fois qu'un auteur utilisera pseudo et nom véritable

(Hempey/Pelaprat, Duchäteau/Vasseur, Greg/Albert (2 pseudos cette fois), etc.)

Cela colle d'autant mieux qu'en 1964, Claude-Henri a 49 ans.

Deuxième petit problème les bios qui lui sont consacrées n'indiquent pas sa présence

pour J2 Jeunes que sur la série Anita de François Drall et Flower Jan d'Hempey.

Vite BDoubliées.com !.

Nouvelle impasse pas de trace de François Drall

dans J2 Jeunes et encore moins d'Anita. Et si Hempey est bien présent,

Flower Jane est aux (BD) oubliées absentes.

Même quand on regarde Cœurs Vaillants et Formule 1, les titres encadrant J2, rien,

Mais après tout nous sommes des bénévoles passionnés et l'erreur est humaine.

Donc il doit bien s'agir de Claude-Heuri.

(Plus d'info dans l'album)

Pareil titre de recueil n'est pas très respectueux pour les histoires qui suivent mais il est très

vrai quant à mes propres carences. Voici donc 14 histoires qui par manque de temps, de place et

de négligence de ma part avaient été oubliées des tomes précédent.

Sauf énième oubli de ma part ce cinquième tome clôt les récits complets historiques de

5 pages parus sur la période 1964-1966 dans J2 Jeunes.

On remarquera une fois encore que si il y a diversité côté dessins c'est moins le cas côté textes puisque Guy Hempay, pseudo de Jean-Marie Pélaprat (927-1995) signe 6 des 14 histoires.

LISTE DES HISTOIRES

1. Etienne Marcel. Guy Hempay Jean- Lou

2. Le drame de la forêt du Mans. Guy Hempay Francey

3. Benjamin Franklin, journaliste, inventeur et diplomate. Georges Fronval Y. Groux

4. Sainte Hélène, petite île. Guy Hempay Francey

5. La révolte des barbus. Guy Hempay Brochard

6. L'homme qui découvrit Troie Dany François Pascal

7. Fantasia, la vie de Will Rogers, cow boy humoriste. Georges Fronval Alain

8. Le prisonnier de Lambaréné. Guy Hempay Perrier

9. Saint-Exupéry. Dauy François Mouminoux

10. Le Jean Bat. Yves Gilbert (texte et dessin)

11. Le sabordage de la flott. Louis Saurel Yves Gilbert