Raymond Reding (1920-1999) est un auteur Tintin, tout le monde le sait.
Il est entré dans ce journal en 1950 à une
époque où un accord tacite existe entre la maison de la rue du Lombard
et celle de Marcinelle de ne pas faire
monter les prix en débauchant les équipes de l'autre.
En 1953 outre différentes couvertures, illustrations et récits complets
Reding a déjà livré deux histoires à suivre
et Monsieur Vincent et il a également travaillé sur Les
sans en être toutefois crédité dans ce dernier cas.
Or voici qu'on le trouve cette année-là dans Spirou et dans une aventure
à suivre qui plus est. On est tenté de dire comme dans
le Dandin de Molière : « Qu’allait-il donc faire dans cette galère ? » ?
Ces Œufs durs s’en vont en guerre sont-ils la preuve d'une
volonté de quitter Tintin pour Spirou ou à tout le moins de manifester
un mécontentement à sa rédaction en chef ?
L'affaire tourne court et Reding ne travaillera plus pour Dupuis sinon
sur deux récits complets destinés à Risque-Tout. Toutefois
la disparition de la revue fera que la dernière histoire paraîtra en 1959
dans Spirou mais a raison de deux planches par page,
histoire de bien montrer à la maison d'en face
que la hache de guerre n'était pas déterrée.
Ces Œufs durs sont une bande d'enfants dont l'aventure est plutôt
destinée à des enfants.
Mais on retrouve le style de Reding avec un dessin d’une incontestable
qualité alors qu'il est un pur autodidacte.
Si au physique le M. Coquambois n'a rien à voir
avec Élémir de Criquebeuf du Pacte de Pashutan leurs caractères
sont assez proches
ainsi d'ailleurs que leur façon de vivre. Ils
ont ainsi tous deux un valet en livret, sorte de Nestor dévoué à leur patron.
Ces gamins préfigurent les multiples BD de bandes de gosses comme le Totoche de Tabary, les As de Greg, la Ribambelle de Roba, etc...
Mais tous, hormis Craenhals, ont opté pour un
style comique, alors que Reding conserve malgré tout un trait sérieux, certes pas autant que ses purs récits réalistes mais suffisamment pour créer un décalage.
C'est sans doute pourquoi ces œufs durs là glissent moins bien dans le gosier
que leur petit camarades.
On trouve néanmoins chez tous quelques mêmes invariants :
la cabane dans le terrain vague
où les gentils gamins viennent se retrouver, les mauvais garnements prêts
à faire un mauvais coup, des adultes souvent d'apparence
sévère mais finalement patelins, etc...
Perception réelle du monde de l’époque ou réalité fantasmée par les auteurs d'alors ?
Les deux, mon général, il n'est pour s'en
convaincre que de revoir les films français mettant en scène des enfants ou des ados,
de l'immédiate avant-guerre jusqu'au
tout début des années 60, pour constater qu'on retrouve grosso modo les mêmes clichés.
Il y aurait beaucoup à dire mais comme disait Kipling, "c'est autre histoire".
Nous apprécions grandement que Voltaire57 nous offre
un autre album d'une qualité exceptionnelle
Album nº 260 réalisé par Voltaire57
Publié par Monsieur Augustin