"Les belles histoires de l'oncle Paul", puis "Les plus belles histoires de l'oncle Paul"


Louis Adolphe Forton est né en 1879 dans la petite ville de Sées, dans l'Orne, en Normandie. Fils d'un marchand de chevaux, il était tout naturel qu'il travaille d'abord comme jockey de courses hippiques. Lors d'une course, il rencontre les frères Offenstadt alors éditeurs de magazines réputés (leur entreprise deviendra plus tard la Société Parisienne d'Édition).
Les frères projettent de lancer un magazine pour enfants et, comme Forton a un talent pour le dessin, il est engagé comme illustrateur. En mai 1904, Forton fait ses débuts comme graphiste dans le magazine d'Offenstadt L'Illustré, en créant la bande dessinée « L'Histoire du Sire de Ciremolle » (numéro 6, 10 juillet 1904).
En avril 1908, Forton devient également le dessinateur principal de L'Épatant, un nouveau magazine lancé par Offenstadt (le premier numéro est un supplément gratuit du Petit Journal).
Forton crée de nombreuses couvertures et illustrations.
Le neuvième numéro, le 4 juin 1908, publie le premier épisode des « Pieds Nickelés ». La série met en scène trois vagabonds frileux et le titre (« Les Pieds Nickelés ») fait référence à leurs pieds sensibles « qu'il ne faut pas utiliser pour des travaux pénibles ou difficiles ».
Ribouldingue porte une barbe noire. Filochard porte une moustache et un cache-œil. Croquignol est le chef chauve et au nez pointu de la bande. De nombreuses intrigues mettent en scène le trio en quête de nourriture ou d'argent et s'attirent des ennuis.
Leurs principaux adversaires sont le commissaire Croquenot et l'inspecteur Duflair, qui tentent constamment de les arrêter.
Même si la série a été créée dans la tradition européenne primitive avec des légendes de texte sous les images, Forton a fait de gros efforts pour convaincre ses éditeurs de lui permettre d'ajouter des bulles de dialogue à certains de ses panneaux.
Dès son lancement, « Les Pieds Nickelés » connut un immense succès. Les lecteurs apprécient les aventures humoristiques du trio, qui ridiculisent souvent la police, les juges, les aristocrates, les officiers et les hommes politiques.
Le 5 octobre 1924, Forton interrompt temporairement « Les Pieds Nickelés » pour lancer sa deuxième grande série, « Bibi Fricotin ».
Apparu dans le magazine d'Offenstadt Le Petit Illustré, Bibi était à l'origine un garçon de ferme chétif et paresseux, travaillant pour son oncle Isidore. Dans la plupart des gags, le gamin consacre bien plus d'énergie à jouer des tours à sa famille, aux animaux de la ferme et aux autres personnes de son entourage.
Initialement un gag, « Bibi Fricotin » évolue rapidement vers un feuilleton d'aventures. Bibi perd son côté farceur et devient un garçon plus vif d'esprit et débrouillard. Il rejoint ensuite un cirque, voyage à travers le monde et travaille comme journaliste et détective. Forton continue de créer les aventures de « Bibi Fricotin » jusqu'à sa mort en 1934.
Nous remercions JLM & TheWitch pour ce magnifique
Il s’est éteint à Apple Valley, en Californie le 16 décembre, à l’âge de 90 ans.
Un
autre grand nom de la BD nous a donc hélas quitté ce 18 décembre mais
bizarrement, alors qu’il aurait dû bercer mon enfance de mille et mille
dessins, parce qu’à l’époque bien trop peu édité en albums, je n’ai pu vraiment
l’apprécier que plus tard au moment où de courageux petits éditeurs ont osé
nous le remettre en mémoire !
Né à
Bruxelles le 10 Avril 1931 de parents français, c’était le petit-fils de Louis
Forton, le créateur des Pieds-Nickelés. Il est resté en Belgique jusqu’à l’âge
de 9 ans, puis ses parents sont rentrés en France où il a fait ses études à
l'Ecole des Beaux-Arts de Paris et son diplôme en poche, il débute dès 1950 par
quelques récits complets dans « Caméra 34 », une revue bimensuelle de
bande dessinée considérée comme le premier petit format français parue aux
éditions Vaillant d’avril 1949 à janvier 1955.
Monsieur
Augustin et ses collaborateurs nous ont déjà permis d’apprécier les dessins de
Gérald Forton de nombreuses fois : notamment dans la série « Les
Belles histoires de l’Oncle Paul », dans « Les récits courts
indépendants de Vaillant » et des recueils de « Récits courts dans
Tintin », dans des récits « Authentique », dans Tiger Joe,
Jacques Flash, Bob Morane, Teddy Ted, Les mystères de l'ouest, Cyril Sainclair
et Borsalino.
A
titre d’hommage, je vous propose de découvrir une partie de ses autres œuvres :
Kim Devil
(scénario: Jean-Michel Charlier – 4 tomes 1953-1957 - Dupuis / Sangam)
Le garage bleu
(scénario: Gérald Forton – one schot – Dupuis / Forton /
Taupinambour)
Les Aventures d'Alain Cardan
(scénario: Yvan Delporte – 4 tomes – Coffre à BD / Hibou)
Alain Cardan ?… Il exerce un métier très rare : celui de
cosmonaute.
Athlétique, super entraîné, il est capable d’encaisser des
pressions de 10 G. C’est aussi quelqu’un sur qui on peut compter :
consciencieux, honnête, intègre, il est prêt à accepter toute mission. Il
n’est pas rare, en effet, que de grands trusts internationaux veulent avoir la
mainmise totale sur la Terre pour en prendre le contrôle. C’est Ainsi qu’Alain
va devoir intervenir contre ces organisations ou des savants fous qu’il devra
neutraliser…
Ben Barry
(scénario: Gérald Forton – one shot – 1961 – Ed. Pan Pan)
Capitaine Morgan
(scénario
Jean Portelle & Jean-Jacques Marine – one shot – 1962 – Ed. du
Taupinambour)
Cet album raconte une partie de la vie du célèbre pirate
qui mourra néanmoins dans la peau d’un gouverneur de la Jamaïque. L’histoire
s’arrête avec la prise de Panama et du fabuleux butin qui l’accompagne.
D’autres pages sur la vie de Morgan restaient à écrire mais la fin tragique du
scénariste Portelle met un terme à tout cela.
Yvain de Kanheric
(scénario: Maric – 2 tomes – 1976 - Ed. Michel Deligne)
Le Moyen Age…
On y
fait la rencontre d’Yvain de Kanhéric, un jeune chevalier plein de fougue et de
témérité qui s’est juré de défendre la veuve et l’orphelin. Mais ce Moyen Age
est aussi une période remplie de sortilèges, de sorciers, de mystères à
élucider. C’est ce que va tenter de faire Yvain, assisté de la douce Viviane de
Galahout et de son capitaine des gardes…
Histoire de France en bandes dessinées T12
(scénario: Roger Lécureux - partie ½ - 1977 – Larousse)
Rem :
il a participé à trois récits de cette série entre 1977 et 1978.
Aymeric
(scénario: Michel Roquebert – 2 tomes – 1978 – Ed.
Loubatières)
Récit historique
au sens propre du terme racontant la croisade des Albigeois, contre les
cathares, secte manichéenne abritée par Raymond V, Comte de Toulouse, au XIIIe
siècle.
Les grandes
affaires criminelles et mystérieuses T08
L’affaire Pauline Dubuisson
(scénario: Julien Moca – 2012 – Ed. De Borée)
Les aventures de Ed Logan – T01 – La tour de Babel
(scénario: Gérald
Forton – 2016 – 2 tomes – Alain Beaulet Editeur)
Dans cette nouvelle fiction du
maître du western, Ed Logan, le héros, nous conduit lors d’une chevauchée
homérique dans les dédales emplis de danger d’une ville labyrinthique.
Rem. :
Un second album des Aventures d'El Logan est paru chez le même éditeur en
février 2019 : « La piste sans fin »
BONUS 1 : HOP ! n°86
(juin 2000)
Un numéro de la revue consacré
à Gérald Forton
BONUS 2 : VIDEO
En mai 2016, à l’occasion du premier festival Vinyle-BD mania organisé à Sées (Orne), Gérald Forton, dessinateur de renom avait fait l’amitié aux organisateurs de venir d’Apple Valley en Californie où il est en villégiature depuis une trentaine d’années pour répondre à l’invitation de ce festival dans la ville de son grand-père, Louis Forton :
BONUS 3 : un article de Gilles Ratier en 2010 :
Un mot aussi sur sa vie aux Etats-Unis :
Lors
d’une collaboration en 1978 avec la revue « Télé junior » qui publie
des adaptations en bande dessinée de diverses séries télévisées françaises et
anglo-saxonnes, Forton tisse des contacts avec les Etats-Unis. Et comme Pif Gadget
lui demande d’adapter en Bd la série Tv US « Les Mystères de
l’Ouest » qui met en bande dessinée la série US, l’éditeur l’envoie en
1979 à New-York pour négocier des pages à la prestigieuse maison DC Comics. De
fil en aiguille il rencontre des gens dans cette maison d’édition US mais aussi
chez Marvel.
« J’ai fait mon tout premier comic-book à l’hôtel ! Je
me suis alors retrouvé propulsé dans cet univers qui me fascinait depuis si
longtemps parmi tous ces éditeurs spécialisés dans le western, la guerre, les
séries d’aventure… C’est comme ça que j’ai relancé Jonah Hex qui était parti
aux oubliettes. Ma nouvelle vie personnelle se conjuguait avec une nouvelle vie
professionnelle ! »
Il
décroche alors un contrat de trois ans à New-York avant de mettre le cap sur la
Californie « car les chevaux me
manquaient trop ! ». Le cheval fait partie de son ADN, « Chez mon grand-père d’ailleurs c’est sa
passion des chevaux qui m’attirait le plus, davantage que le dessin, il était
jockey. ». Toute sa vie est marquée
par la vie d’après la Libération par les Américains. Il retourne bien en France
durant six mois comme rédacteur en chef de Télé Junior mais il repart très vite
aux Etats-Unis à New-York qui lui manque trop. « Je pense que j’étais le seul rédacteur en chef avec une planche à
dessin dans mon bureau ! »
Les
années 80 sont jalonnées pour Gérald Forton par des collaborations à des titres
de comic books tels Battlestar Galactica, Spiderman, Thor, Captain America,
Hulk, Les Quatre fantastiques ! « Des
séries que je ne suis jamais allé voir au cinéma… sauf le Superman avec
Christopher Reeves ».
Mais
son installation en Californie embête quand même fortement DC Comics qui le
trouve bien trop éloigné. Alors les demandes se tarissent. Jusqu’à ce qu’un
gars de DC lui donne une adresse où il laisse un port-folio. Un studio
naissant, surpris du reste de ne pas découvrir un jeunot derrière le
port-folio. Le studio commence la série des Maîtres de l’univers (He-Man and the
Masters of the Universe) et il entre alors de plain-pied dans une tout autre
dimension en devenant caracter-designer, story-boarder, dessinateur des
backgrounds… c’est-à-dire tout l’univers des cartoons pour le studio Filmation.
Filmation
est vendu dans les années 90 et ferme. Gérald Forton est alors recruté chez
Hanna Barbera puis Spears et Dreamworks qui vient d’être lancé où il dessine
notamment les chevaux du Prince du Nil.
« J’ai travaillé sur les Razmokets, James Bond
Junior, l’Inspecteur Gadget… et puis on m’a proposé Bob l’éponge mais là j’ai
dit non ! »
Il
décide de quitter l’animation pour se concentrer davantage sur les story-boards
des films (les scènes d’un film dessinées pour préparer leur mise en scène) et
on le retrouve sur Coyote girls, Starship Troopers mais aussi sur le Ali de
Michaël Mann où il chorégraphie les scènes de boxe, de véritables moments de
grâce. « Pour Ali c’était jusqu’à quarante dessins de réalisés pour une
seule séquence ! ». Intégrer le petit monde des story-boarders aux USA est
un tour de force « Il n’y en a pas plus de 110, je pense. Et c’est très rare
d’être crédité au générique ! ». C’est ainsi qu’il participe au
storyboard du film Prince Vaillant et de Toy Story 1.
Au
début des années 2000, vivant en Californie, il renoue avec le marché
franco-belge, notamment en travaillant pour les éditions Semic dans les petits
formats : il livre quelques couvertures, réédite quelques histoires courtes de
western ou de science-fiction, et lance la série « Galton & Trumbo »
avec Jean-Marc Lainé au scénario. Il s’essaie même aux story-boards de jeux
vidéo. Jusqu’en 2005 quand on lui fait remarquer qu’il est trop vieux !
Jugeant
tout le contraire, Forton se retrouve dans des conventions comme le Power Con,
reprend en 2013 les Pieds nickelés et en 2016 un album « Bibi Fricotin et
la boîte aux rêves » en hommage à son grand-père mais aussi en 2017 Teddy
Ted plus de quarante ans après la fin de la parution dans Pif Gadget : un
album paru aux éditions Hibou : « 1899 Deadstone » (mars 2021)
avec, remplaçant Roger Lécureux disparu, Philippe Cottarel au scénario.
Homme
chaleureux et modeste, passionné pour le western au point d’avoir réalisé son
rêve en vivant de nombreuses années dans un ranch, au milieu des chevaux au
pays des cow-boys, dessinateur efficace, rapide, à l’encrage sûr, au style de
dessins reconnaissable, très productif durant toute sa vie en osant aborder
avec brio tous les genres de la bande dessinée, Gérald Forton sera toujours à
nos yeux un des grands maîtres du 9ème art !
Nos condoléances les plus sincères à tous les membres de sa famille.
Texte et dossier de Philippe
Grand merci pour cet excellent hommage
Publié par Monsieur Augustin