3. Le mystère de la femme araignée
Une BD de Wilfrid Lupano et Paul Salomone chez Delcourt (Conquistador)
05/2014 (21 mai 2014) 46 pages Grand format
Vous souvenez-vous de Tim Bishop, le petit jeune qui en pinçait pour Margot de Garine ? Le gaillard est toujours sur la piste de la belle, même si ses sentiments ont changé. Ne l'a-t-elle pas abandonné, ficelé à un rocher au milieu de nulle part ? De leur côté, Byron Peck et Knut Hoggaard sont aussi remis sur selle et filent vers le Canyon de Chelly. D'ailleurs, tout le monde semble se diriger vers ce lieu emblématique de la culture navajo. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour la fortune/l'honneur/la vengeance (rayer les mentions inutiles) ?
Wilfrid Lupano continue sa relecture personnelle de l'Histoire des USA dans Le secret de la femme araignée. Comme à son habitude, le scénariste du Singe de Hartlepool mêle habilement, avec pas mal de poudre, farce et critique acerbe. Ainsi, le potier navajo déjà aperçu dans les tomes précédents se révèle être un vrai-faux indigène pour photographies « authentiques », tandis que la troupe tombe sur William, un vrai Noir ancien esclave devenu indien par la force des choses. Comme le dit Tim : « Il y a un problème d'identité dans ce pays » ! Lupano écorche avec jubilation les stéréotypes de la conquête de l'Ouest en retournant les faits, pour le plus grand plaisir du lecteur. Techniquement, la construction narrative est sans faute. Retours en arrière, scènes d'action, moments absurdes (les dialogues font toujours mouche) et plus graves s’imbriquent les uns dans les autres d'une manière fluide, quasiment naturelle. Résultat, un album dense, mais parfaitement maîtrisé.
Graphiquement, Paul Salomone rend une copie à l'unisson. Style précis, cadrages audacieux made in Hollywood et galerie de tronches pas piquées des vers (les bonnes sœurs façon Marie-Thérèse des Batignolles chère à Maëster, par exemple) remplissent les planches. Toujours à la limite de la caricature sans tomber dans l'excès, le dessinateur garde juste ce qu'il faut de distanciation : oui, une farce, mais profitez de rire maintenant, ça ne va pas durer. Dernier point remarquable, les couleurs de Simon Champelovier s'insèrent harmonieusement aux dessins. En effet, celles-ci sont denses, bien en place, mais n'étouffent jamais le trait minutieux de Salomone. Comme pour le scénario, l'exercice est extrêmement équilibré du début à la fin.
Western parodique et sombre constat à la fois, L'homme qui n'aimait pas les armes à feu continue à étonner et à détonner. Suite et fin de cette brillante série dans le prochain tome.
Texte: A. Perroud [http://www.bdgest.com]
Scan de MID et retouches de Lara60
Bonjour
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